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Le 7 octobre 2008, alors que je prospectais en compagnie de Stephan Carbonnaux un secteur du plateau de l’Aubrac, à la recherche de divers indices d’animaux sauvages et notamment d’épreintes de loutres, que nous dissertions sur l’absence de meutes de loups en ce lieu qui leur siérait pourtant bien, et de la nécessité pour les naturalistes d’oeuvrer à la réconciliation de l’homme avec la nature, nous décimâmes de clore cette après-midi en rejoignant un bois situé à proximité afin d’affûter dans une clairière.

Assis à même le sol, blottis contre les sacs à dos, jumelles à portée de la main, nous scrutons, écoutons, humons, en fait nous adoptons sans nous en rendre compte le comportement du mammifère prédateur.

Le calme règne, et seuls quelques passereaux animent les lieux, quand au bout de 20 mn, une décharge d’adrénaline m’envahit, je souffle à mon voisin “Goupil droit devant !”.

A environ 100 mètres juste en face de nous se présente un magnifique renard roux (Vulpes vulpes). Immédiatement nous nous allongeons, glissons derrière nos sacs, enfilons les cagoules et jumelons pour observer le plus discrètement possible. Le renard ne nous a pas repéré tant il est à ses affaires.

En effet, il scrute le sol, la tête tantôt inclinée à droite tantôt à gauche, il est en action de chasse et utilise ses ouïes pour détecter la moindre présence de proies, puis, comme s’il était monté sur ressort, effectue un bond vertical extraordinaire, le dos courbé, pour retomber les deux pattes avant jointes sur une proie que nous ne parvenons pas à voir, mais il s’agit généralement de micros mammifères et plus particulièrement de campagnols.

Il se déplace de quelques mètres et recommence, regarde un peu autour de lui puis reprend,  ponctuant ses prospections de fabuleuses détentes. Le voici qui disparaît de notre vue derrière une haie pour réapparaître presque aussitôt de l’autre côté. Nous nous régalons, un pur moment de bonheur pour deux passionnés comme nous.

Renard s’arrête, s’assied, se gratte une oreille et reprend tranquillement sa chasse, il mulotte à plusieurs reprises, avec succès semble t’il.

Nous savourons le spectacle, la lumière et l’ambiance ajoutent à la féerie.

C’est alors que Stephan me glisse à l’oreille : “je vais essayer de le faire venir en imitant le mulot”, cela me fait sourire et m’amuse. Je redouble donc d’attention et fixe l’animal tout en entendant Stephan pousser de fins petits cris qu’il fait en pinçant les lèvres. Le renard réagit immédiatement, il regarde dans notre direction, oreilles bien droites ; son regard lumineux me fascine ; je l’admire en détail, ses vibrisses, la brillance de son pelage, le blanc, le roux, le noir, son allure élégante, tout est parfait, un chef d’oeuvre de la création. Oui, la nature est peuplée d’innombrables merveilles.

Sans se presser, méticuleusement, il s’avance, s’arrête, écoute et reprend sa progression tout en regardant dans notre direction, mais sans nous discerner, preuve que notre camouflage est efficace.

Stephan continue ses appels, le renard n’y résiste pas et s’approche de plus en plus, non sans entamer un léger arc de cercle, comme s’il souhaitait nous prendre à revers, j’ai l’impression qu’il ne tient pas à arriver de face sur le campagnol et j’aime à croire que ce peut être sa stratégie. En moi-même je me dis qu’il a raison, un campagnol de 60 kg il vaut mieux le prendre par surprise.

Le renard est à 50 mètres, caché par un bloc de granit.

A immortaliser la rencontre c’est maintenant ou jamais, j’en profite pour quitter mon poste et me rendre derrière un amas de rocher, je monte au front en quelque sorte.

Dans mon dos j’entends Stephan qui continue de leurrer Renard, mais Renard se méfie, il n’avance plus. Si, le voilà qui réapparaît, toujours intrigué par les “couinements” de mon acolyte. Je glisse doucement l’appareil photo sur le côté de ma planque et je zoome.

Bien sur il a perçut le mouvement, je suis repéré. Il m’aperçoit, me fixe, je déclenche, pas de réaction du renard qui ne doit plus trop comprendre ce qui se passe.

Je me retire derrière la roche et ne bouge plus, attendant les instructions de Stephan qui a tout suivi.

Celles-ci ne tardent pas, Stephan me fait comprendre d’un signe de la main que Goupil a préféré abandonner sa quête, se doutant qu’il y avait là une supercherie dont il valait mieux se méfier.

Notre journée se soldait donc par l’un des moments favoris des amoureux de la nature, la rencontre avec le sauvage. Il va de soi que durant les minutes qui suivirent nous échangeâmes nos impressions tout en regardant s’il n’était pas encore dans les parages. Un mouvement furtif à travers les arbres nous fît dire que cette fois c’était peut-être lui qui nous observait.

MC

Question à l'attention des prêfets :

Sachant qu'un renard consomme plusieurs milliers de campagnols par an, et ce, aussi longtemps que les populations sont présentes sur un terrain. Sachant que les campagnols ont de 3 à 8 nichées par an et de 3 à 10 petits par nichées.

 Comment pouvez-vous en votre âme et conscience justifier la publication d'un arrêté inscrivant le renard sur
  la liste des nuisibles ? 

 

 

 

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