A plusieurs reprises j’ai essayé de savoir combien il y a d’ours bruns (Ursus arctos) et d’ours bruns d’Europe (Ursus arctos arctos) en captivité en France. Impossible d’obtenir la réponse, rien sur la toile électronique, que ce soit sur les sites des associations de protection de la nature, que ce soit sur le site du MEEDDAT (quelle horreur ce sigle), ou que ce soit directement sur les sites des parcs animaliers et zoos. Ces derniers devraient pourtant me semble-t-il recenser en ligne leur “cheptel”. Il y a là un manque qui n’est pas dû au hasard.
Si je souhaite connaître ce chiffre, c’est afin de le comparer avec le nombre d’ours vivant en liberté en France et montrer telle une évidence combien l’animal sauvage est peu considéré dans notre société anthropocentriste. Les chiffres seraient probablement éloquents.
Rien que pour les Pyrénées il y a au moins autant d’ours enfermés que d’ours en liberté, soit une quinzaine. Alors imaginez en recensant les ours présents sur l’ensemble des parcs et zoos au niveau national.
A défaut de vous communiquer le nombre d’ours derrière les barreaux, voici celui des espaces zoologiques français, il se chiffre à 925. Il faudra fêter les 1.000 dites moi ! Allez, je ne vais pas faire mon ours mal léché et j'accepte de relativiser ce nombre, puisqu’il inclut des jardins abritant uniquement des mammifères domestiques, les classiques cygnes et paons et quelques conservatoires d’abeilles, mais il n'en reste pas moins révélateur de notre propension à encager la nature. En comparaison il n’y a que 7 parcs nationaux. Pourquoi en ce début de 21ème siècle continuons nous d’accepter cela ?
Et c’est là que je veux en venir, on préfère sauvegarder l’animal sauvage en l'enfermant derrière des barreaux ou dans des fosses, plutôt que le maintenir libre dans son milieux naturel. C'est pour le moins paradoxal.
Je lis et j’entends que les parcs animaliers ne sont plus des zoos où l’animal vit emprisonné dans une cage de 5 mètres sur 5. Certes il y a eu des progrès, mais jusqu’à preuve du contraire la semi liberté n’est pas la liberté, et les cirques existent encore eux.
Autre argument en vogue : "le but d'un zoo n'est pas de tenir des animaux, mais d'assurer le futur des espèces".
Ours au PAL (parc attraction et animalier) juillet 2009.
Malheureusement ces parcs servent malgré eux un système pervers au service de l’économie qui nous fait croire que la sauvegarde des espèces passe par là, alors que c’est un pis aller.
La propagande visant à présenter les écozoos et autres parcs comme les garants de la sauvegarde des espèces n’a d’autre but que de nous faire accepter leur disparition à l’état naturel, et par conséquent y contribuer.
Pumas au PAL (juillet 2009)
En dehors de la réintroduction quand celle-ci s'avère indispensable, la seule solution digne, humaniste, efficace, est d’agir en amont et non en aval. C'est à dire se donner les moyens de maintenir les espèces à l’état sauvage dans leurs milieux naturels tout aussi sauvages.
Dans le sillage des parcs avec leurs animations de rapaces, perroquets ou autres otaries, se sont engouffrés les communes et leurs festivals d’été qui présentent des spectacles avec montreurs d’ours ou exhibition de loups.
L'animal sauvage ne doit pas être une distraction ni vivre en captivité. Il doit bénéficier d'un statut qui le protège intégralement, en ce sens je préconise que l'on déclare "les droits des animaux" au même titre qu'il existe "les droits de l'homme".
Il est inconcevable d’imaginer le grand bestiaire de la planète condamné à la prison à perpétuité. Il n’est pas plus concevable de trouver une raison valable à cela.
Chaque fois qu’une espèce disparaît ou perd sa liberté, l’homme s’installe un peu plus dans la grande prison de la solitude.
Michel CHALVET